« Le Rassemblement national renoue avec une vision pétainiste du travail »

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Tribune. Les propos racistes du député Rassemblement national (RN) Grégoire de Fournas, tenus début novembre dans l’Hémicycle à l’égard du député « insoumis » Carlos Bilongo, ont fait tomber les masques : le Rassemblement national est toujours le parti héritier du pétainisme et de son racisme. Un vent nouveau d’indignation souffle désormais sur l’ensemble des bancs républicains de l’Assemblée. Avec la sanction de son député, la stratégie de « normalisation » du RN se fissure.

Depuis leur arrivée à l’Assemblée nationale, les députés d’extrême droite tentent pourtant de jouer la carte de l’opposition constructive. Ils sont calmes, ne haussent pas le ton, joignent leurs voix à de nombreux votes de la majorité ou des oppositions. Le doigt sur la couture du pantalon, aucune tête ne dépasse, seuls les porte-parole du groupe s’expriment avec un verbiage calibré. Mais peut-on juger la crédibilité politique d’un groupe à sa posture ? Bien plus que l’attitude dans l’Hémicycle, c’est l’inspiration politique de leurs propositions qui permet de les démasquer.

L’exemple le plus frappant est venu lors de l’examen de la réforme de l’assurance-chômage commencé en octobre. En portant un amendement excluant les étrangers travaillant en France des élections professionnelles, le Rassemblement national renoue avec une conception vichyste propre à la Charte du travail de Pétain, dans laquelle travailleurs et patrons font cause commune nationale contre les puissances ennemies et contre leurs « alliés de l’intérieur ». Le clivage au sein de l’entreprise, intrinsèquement lié à la relation de subordination entre salariés et directions, y est remplacé par la prévalence des intérêts économiques nationaux.

Une invisibilisation cynique

Cet impératif national impose la modération des revendications salariales, qui sont alors soumises à la générosité que la fibre patriotique est supposée provoquer chez le patronat. Cette logique néocorporatiste se développe dans les années 1930 en réaction et en opposition au concept de lutte des classes qui structure les revendications ouvrières.

Au clivage horizontal de l’unité de la classe ouvrière, liée par ses conditions difficiles de vie et son exploitation par la classe patronale qui ne travaille pas, l’extrême droite substitue le clivage vertical d’une unité nationale entre ouvriers et patrons français, liés par la nécessité de défendre la nation dont la survie serait en jeu, en proie à un supposé dévoiement des mœurs, à une prétendue décadence morale, à l’avidité des puissances étrangères et celle de ses fantasmatiques alliés de l’intérieur.

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