« La réforme des retraites qu’Elisabeth Borne doit dévoiler le 10 janvier fait de 2023 une année politique charnière »

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Il est tout sauf banal qu’une nouvelle année, qui plus est placée sous le signe du besoin d’« unité » par le chef de l’Etat, s’ouvre sur la perspective d’une épreuve de force programmée et assumée. La réforme des retraites qu’Elisabeth Borne, la première ministre, doit dévoiler le 10 janvier fait de 2023 une année politique charnière. Le relèvement de l’âge de départ à la retraite à 64 ou à 65 ans est censé combler le déficit du système de répartition dont le Conseil d’orientation des retraites (COR) prévoit la réapparition dès cette année. Mais il est devenu bien plus que cela : un objet symbole autour duquel les forces politiques vont poursuivre leur recomposition. Si l’issue de la confrontation n’est évidemment pas connue, on sait en revanche déjà qu’elle aura des répercussions sur les équilibres politiques en cours.

Tout a priori joue en défaveur de l’exécutif, qui a contre lui l’opinion publique, les syndicats, les forces de gauche, le Rassemblement national (RN) et une partie de la droite. On se demande ce qui a bien pu pousser le président de la République à prendre un tel risque, alors que les crises qui secouent le pays créent la peur et renforcent le désir de protéger les avantages acquis.

Une lecture très Ve République des institutions ne suffit pas à expliquer son acharnement. Certes, Emmanuel Macron a fait campagne autour de la retraite à 65 ans. Mais les élections législatives qui ont suivi ne lui ont pas accordé de majorité suffisante pour la faire voter. Il est même probable que ce chiffon rouge a contribué à doper le score de ses adversaires. Deux légitimités s’affrontent donc autour de la réforme, l’une présidentielle, l’autre parlementaire.

Le fait qu’Emmanuel Macron ne puisse pas se représenter en 2027 explique davantage son acharnement. Laisser une trace dans l’histoire, agir vite avant que les querelles de succession ne viennent entraver sa liberté apparaissent comme deux puissantes motivations. Prenant à témoin les futures générations, le chef de l’Etat a beaucoup fait pour que la réforme des retraites, qui aurait pu n’être abordée que sous l’angle du sauvetage du système par répartition, devienne l’emblème de sa politique : augmenter le volume de travail pour soutenir la croissance, refuser les hausses d’impôts pour ne pas nuire à l’attractivité et à la compétitivité, viser la fin du chômage de masse pour tenter de surmonter la dépression collective.

En excluant de mettre sur la table toute autre solution pour renflouer le système des retraites (comme, par exemple, une légère augmentation des cotisations combinée à un allongement de la durée de cotisation) , il savait qu’il se mettrait à dos les syndicats et la gauche tout entière. Il a assumé la bataille politique. Le problème est qu’en l’état actuel des sondages, il a aussi une majorité de Français contre lui.

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