Congrès du PS : un vote à haut risque pour Olivier Faure

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Y aurait-il un petit, un tout petit regain d’intérêt pour le Parti socialiste (PS) ? Le débat télévisé entre les trois prétendants au poste de premier secrétaire, vendredi soir sur France Info, a réuni, selon la chaîne, 150 000 téléspectateurs, grâce auxquels elle a doublé sa part d’audience habituelle. « Et il y a eu 600 000 vues tous supports confondus », plastronne Jean-Christophe Cambadélis. L’ex-patron du parti y décèle la preuve de la curiosité pour le 80e congrès du PS, qui s’achèvera le dernier week-end de janvier à Marseille. Les enjeux, il est vrai, ont de quoi réveiller l’appétit des 41 000 militants appelés à voter. Il en existe deux principaux. D’abord, pour la première fois depuis son élection initiale en 2018, Olivier Faure se trouve dans une position inconfortable, contesté par deux rivaux ; ensuite, le 80e congrès devra trancher une ligne politique majeure : le PS doit-il poursuivre son mariage forcé au sein de la Nupes, voire l’embellir ? En cas de réponse négative, c’est tout l’attelage construit à la va-vite au lendemain de l’élection présidentielle qui tanguerait.

Sur la ligne de départ, donc, trois candidats. Olivier Faure (le champion sortant, chaud partisan de la Nupes), Hélène Geoffroy (la rivale historique, plutôt sur une ligne sociale-démocrate et anti-Nupes) et Nicolas Mayer-Rossignol (sorte de trublion, dernier arrivé et placé sur une ligne intermédiaire, ni tout à fait pour ni tout à fait contre la Nupes). Jeudi soir, on connaîtra les deux finalistes, ceux qui brigueront ensuite les suffrages des militants pour devenir le successeur de François Mitterrand, Lionel Jospin et François Hollande.

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Mais le vote du 12 janvier n’est pas exactement un premier tour. Au PS, où on aime faire compliqué, il y a d’abord les législatives, au scrutin proportionnel, puis une semaine plus tard la présidentielle, au scrutin majoritaire. Jeudi 12 janvier, les votes des militants désigneront donc leurs « députés » au parlement (le conseil national), ainsi que les membres de l’organe politique (le bureau national). Chaque instance sera composée à la proportionnelle des voix obtenues par les trois textes défendus par les trois candidats précités. Puis, jeudi 19 janvier, place à la « présidentielle » : les représentants des deux textes arrivés en tête seront départagés lors d’un deuxième vote, le gagnant remportant le siège de patron du PS.

La règle du jeu du scrutin est importante. Opposé à deux rivaux de poids, Olivier Faure est dans une situation inconfortable. « Il y aura un tout sauf Faure, c’est obligé », confie un proche d’Hélène Geoffroy. Le premier secrétaire est favori, mais la question qui se pose est la suivante : atteindra-t-il la barre des 50 %, gage d’une réélection (les socialistes sont légitimistes, ils adouberaient dans une semaine celui dont le texte d’orientation est majoritaire) ou échouera-t-il en dessous ? Dans ce deuxième cas, il devrait pouvoir libérer son fauteuil de patron du PS. Ses rivaux sont prêts à le lui ravir : leurs équipes discutent depuis quelques mois pour préparer le ralliement du battu à celui qui restera en piste contre Olivier Faure. « Entre les deux textes d’orientation, c’est fait », assure même un soutien d’Hélène Geoffroy.

Faure peut être Élisabeth Borne ou Jean-Luc Mélenchon

À part la question du nucléaire, les positions de la maire de Vaulx-en-Velin et du maire de Rouen (Mayer-Rossignol) sont très compatibles. Mayer-Rossignol devrait, sans trop renier ses convictions, soutenir Geoffroy si elle arrive devant lui lors du vote, et vice-versa. Les soutiens du maire de Rouen se méfient toutefois : certains voient d’un mauvais œil la ligne politique d’Hélène Geoffroy, trop proche selon eux de la social-démocratie incarnée par François Hollande, qui suit l’affaire de près. « On ne peut pas se rallier à eux, ce serait se dévoyer », observe-t-on chez Refondations, l’écurie menée par Mayer-Rossignol.

Sauf double victoire sans appel de Faure (sur son texte et sur son nom), le Parti socialiste risque de tanguer dans les prochains mois. Le patron du PS peut être réélu, tout en étant obligé de passer des compromis avec des opposants alliés, donc majoritaires dans les instances. Il peut être battu, mais influent au sein du parti grâce à un groupe homogène et soudé. Il peut être Élisabeth Borne, Première ministre de cohabitation, ou Jean-Luc Mélenchon, premier opposant d’un Parlement agité.

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La Nupes risque d’en être la première victime. En cas de victoire de Geoffroy, le PS suspendra l’accord avant de le soumettre au vote des militants. « Il n’y aura plus d’organisation commune, plus de participation au parlement de la Nupes, plus d’intergroupes », prévient Patrick Mennucci, l’un des proches d’Hélène Geoffroy. La Nupes serait alors privée d’un élément important. Si c’est Mayer-Rossignol qui l’emporte, le parti renégociera avec ses partenaires : il refusera une liste commune avec LFI aux européennes ainsi, probablement, que des accords électoraux aux sénatoriales et aux municipales de 2026. Anne Hidalgo comme Carole Delga, toutes les deux derrière le maire de Rouen, y veilleront : elles ne veulent pas connaître la nouvelle « humiliation » – le mot est d’Hidaglo – des négociations préparatoires aux législatives, où leurs candidats avaient pour la plupart été évincés par les accords avec LFI.

« Je n’ai pas voté pour la Nupes pour qu’elle soit le cadre permanent de la gauche. Le congrès est le moment de dire non ! » explique Jean-François Debat. Le maire de Bourg-en-Bresse considère, comme ses amis de Refondations, que le PS doit se libérer de LFI. « Je ne vois pas pourquoi nous devrions continuer à nous plier à l’hégémonie des Insoumis », dit cet ancien soutien d’Olivier Faure passé chez Mayer-Rossignol. Le congrès de Marseille sera donc regardé de très près par un homme qui connaît par cœur les coulisses de ces grands-messes socialistes : l’ordonnateur en chef de la Nupes et ancien sénateur PS Jean-Luc Mélenchon…

Source: lepoint.fr