Cuisiner sans électricité (ou presque) avec la marmite norvégienne

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Marmite norvégienne exposée lors d’un salon en Grande-Bretagne, sur les économies alimentaires en janvier 1918. L’économie de carburant pendant la première guerre mondiale a conduit à l’adoption de ce système de cuisson par inertie.

Œufs cocotte au micro-ondes plutôt que pot-au-feu longuement mitonné. La crise énergétique transparaît dans les engouements culinaires du moment, sur Internet. « Recettes délicieuses et sans cuisson », « Cuisiner presque sans gaz ni électricité », « Recettes qui demandent peu ou pas d’électricité »Les sites de cuisine, ces temps-ci, préfèrent le tiède au bouillant, le juste saisi et même le cru aux plats en sauce. Ils tassent tous les ingrédients dans une grosse casserole, une même fournée. Et redécouvrent les vertus de l’inertie thermique. La magie de la cuisson passive.

Grâce à la chaleur emmagasinée, les pâtes peuvent finir de cuire plaque ou feu éteint, c’est même un Prix Nobel de physique italien qui le suggère – Giorgio Parisi, en septembre 2022, sur Facebook – et Barilla qui le confirme sur ses paquets : deux minutes dans l’eau bouillante puis douze minutes d’attente hors feu, sous couvercle, pour les farfalles… A ce jeu du frichti le plus maigre en énergie triomphent les initiés de la marmite norvégienne. Leurs rangs grossissent si l’on se fie à l’offre et l’audience croissantes des blogs, groupes Facebook, recettes et autres tutoriels consacrés au sujet – 74 000 vues sur YouTube pour « Fabriquer une marmite norvégienne haute performance dans un tiroir », 14 000 pour « Cuisson d’un bœuf bourguignon dans une couverture de survie »…

Marmite norvégienne ? Une histoire de cuisson passive, à nouveau, plutôt que de faitout miraculeux inventé en Scandinavie. Ladite marmite consiste en un réceptacle hermétique très isolé qui accueille, une fois passée l’ébullition, la cocotte bien chaude : la cuisson s’y poursuit sans apport d’électricité ni de gaz, durant plusieurs heures. Une technique volontiers qualifiée d’ancestrale, faute de pouvoir la dater, maniée par les Hébreux pour manger chaud durant le shabbat, par tous les paysans du monde disposant de suffisamment de foin pour enfouir une marmite, présentée par les Norvégiens lors de l’exposition universelle de 1867 à Paris (d’où son nom), exhumée lors des deux guerres mondiales, puis refoulée tel un mauvais souvenir dès l’abondance énergétique revenue.

Plus long, moins coûteux

Jusqu’à ce qu’une conjonction peu réjouissante de facteurs transforme la boîte isolante en star des low-tech version 2023. Le renchérissement de l’énergie, les craintes de coupures de courant, l’érosion du pouvoir d’achat, accessoirement la réduction nécessaire des émissions de carbone, relancent la cuisson à l’étouffée et à l’économie. Au lieu de cuire une heure et trente minutes, les pois chiches, par exemple, quittent le feu dès trente minutes pour un séjour moelleux de trois heures en marmite norvégienne.

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