Retraites : Elisabeth Borne en posture délicate

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La première ministre, Elisabeth Borne, à l'Assemblée nationale, le 31 janvier 2023.

Sous les lustres en cristal de la salle des fêtes de l’Elysée, Emmanuel Macron ouvre large les bras. « Ah, le meilleur défenseur des retraites ! », lance-t-il à l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin, en marge de la cérémonie du Nouvel An lunaire asiatique. Ce vendredi 27 janvier, le chef de l’Etat voit dans le chiraquien de 74 ans la preuve vivante qu’on peut, de Matignon, réformer les retraites tout en préservant le président de la République des éclaboussures de l’impopularité. Sa réforme, en 2003, n’avait-elle pas jeté plus d’un million de personnes dans la rue ?

La première ministre actuelle est absente, affairée de son côté de la Seine, rive gauche. Le chef de l’Etat ne dit pas d’Elisabeth Borne qu’elle est la meilleure ambassadrice des retraites. Mais « quand elle dit quelque chose, elle le dit avec de bonnes raisons », la soutiendra-t-il le 30 janvier, depuis les Pays-Bas.

Le lendemain, la mobilisation, plus massive que les premières manifestations contre le projet de réforme, le 19 janvier, fait l’effet d’un désaveu cinglant à l’adresse d’Elisabeth Borne. Aux alentours de 16 h 30, depuis les bancs de l’Assemblée nationale où elle répond aux questions au gouvernement, la locataire de Matignon s’en inquiète par SMS auprès de son cabinet : « Si on termine à 1,2 [million de manifestants] ou 1,3 ce n’est pas un drame ? On a un risque d’être au-dessus ? », interroge-t-elle. Le chiffre tombe quelques heures plus tard : 1,27 million de Français, selon le ministère de l’intérieur. Sa stratégie destinée à faire atterrir, en douceur, ce dossier brûlant, prend les allures d’un bourbier.

La première ministre a reçu pour mission du chef de l’Etat, dès juin 2022, de « construire un chemin » pour décrocher des « majorités d’idées » à l’Assemblée nationale. Elisabeth Borne redoute à présent de voir la majorité lui échapper sur ce texte impopulaire. Au point qu’à Matignon, on trouve bon de préciser que la porte d’un recours au 49.3 reste fermée à double tour. Une telle voie, qui serait inédite en France pour réformer les retraites, signerait l’échec de la méthode Borne. « C’est no way », avait prévenu la première ministre, à la veille de la mobilisation du 31 janvier, à destination des députés de la majorité.

LR fait monter les enchères

Mais la situation se présente plus mal qu’escompté avec le parti Les Républicains (LR). L’ancienne ministre du travail a réclamé de voir en urgence le président du mouvement, Eric Ciotti, et le chef de file des députés LR, Olivier Marleix, mercredi 1er février au matin, pour jauger la position de la droite. Indispensable au vote, celle-ci fait monter les enchères sur l’emploi des seniors et sur les carrières longues. Les services de Matignon moulinent toujours pour corriger les déséquilibres de la réforme au détriment des femmes ou des jeunes, mais ils renvoient les futurs ajustements au débat parlementaire.

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