Geoffroy Lejeune mis à pied de « Valeurs actuelles » sur fond de bataille éditoriale

La querelle de trop. Ce vendredi 2 juin, Geoffroy Lejeune, le médiatique directeur de la rédaction de Valeurs actuelles, quitte le siège de la rue Georges-Bizet, dans le 16e arrondissement de Paris, avec interdiction de pénétrer de nouveau dans les locaux. Le journaliste et ami revendiqué d’Eric Zemmour vient d’être mis à pied, et de l’annoncer aux membres présents. La mise à pied a été confirmée au Monde par la direction de Valmonde. Le voilà convoqué lundi 12 juin pour un entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. Une étape formelle qui doit permettre à l’intéressé de s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés, mais qui devrait le plus probablement déboucher sur son départ, selon plusieurs sources dans la rédaction et la hiérarchie du magazine.
Dans un climat tendu par le bras de fer qui oppose Geoffroy Lejeune au propriétaire de Valeurs actuelles, l’armateur franco-libanais Iskandar Safa, l’événement déclencheur de la rupture s’est déroulé mercredi, en pleine conférence de rédaction. Au milieu des journalistes, apparaît un visage inhabituel : celui du nouveau président de la maison mère du magazine, Jean-Louis Valentin, arrivé trois jours plus tôt, lundi 29 mai. Cet ex-président Les Républicains de l’agglomération du Cotentin, où se situe le chantier naval Constructions mécaniques de Normandie qui appartient à Iskandar Safa, souhaite assister à sa première réunion éditoriale. Mais le ton serait rapidement monté entre les deux hommes. « C’est ma rédaction, tu n’as rien à faire là. Tu sors ! », aurait en substance lancé Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction depuis 2016, à l’endroit du nouveau président et directeur de la publication, selon le récit d’une source interne. « Tu n’es pas sur un plateau de CNews », lui aurait rétorqué le nouvel arrivant, ajoute une autre.
L’arrivée soudaine de Jean-Louis Valentin n’était pas pour plaire à Geoffroy Lejeune. Comme l’a révélé La Lettre A le 29 mai, elle fait suite au limogeage de Charles-Antoine Rougier, chargé depuis l’automne dernier de veiller à ce que la ligne éditoriale de l’hebdomadaire s’éloigne de l’extrême droite pour se rapprocher de la droite classique, alors que le magazine a couvert la campagne présidentielle en soutenant Eric Zemmour, jusqu’à un grand meeting organisé au Palais des sports en mars 2022 favorable au polémiste. Une mission que Charles-Antoine Rougier n’aurait pas réussi à mener suffisamment à bien.
Depuis plus d’un an, l’actionnaire Iskandar Safa rappelait à chaque conseil de surveillance trimestriel qu’il souhaitait que le magazine ne « roule » pas pour un candidat, selon un participant. Mêmes requêtes au sein de la commission éditoriale présidée par Charles Villeneuve, proche du milliardaire. En vain. « Geoffroy, il s’en fout. Il a continué à droitiser un truc déjà très très à droite », confie un membre de la direction de Valmonde, en référence – entre autres – à la condamnation pour injure publique à caractère raciste de l’hebdomadaire, qui avait dépeint la députée Danièle Obono en esclave, en août 2020. Avant l’irruption d’Eric Zemmour dans l’arène politique, le magazine de la droite radicale était déjà critiqué pour sa couverture avantageant Marion Maréchal, nièce de Marine Le Pen, que Geoffroy Lejeune décrit comme une « amie chère » depuis l’adolescence, même s’il se défend de la favoriser.
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