« J’ai beaucoup de likelihood d’être debout, j’aurais pu y rester » | EUROtoday
« J’essaye de rester debout mais, à l’intérieur, c’est un champ de ruines. » C’est par ces mots que Gisèle Pélicot a conclu sa longue audition jeudi devant la cour criminelle départementale du Vaucluse. Pendant toute une matinée, cette femme de 71 ans, brindille de 1,65 m pour 51 kg, ne vacillera pas. Debout, les mains délicatement posées sur le pupitre, elle racontera avec power détails remark sa vie a basculé dans l’horreur un jour de novembre 2020. Elle répondra à tout, même aux questions les plus dérangeantes sur son intimité et les pratiques sexuelles de son ex-mari. C’est le récit d’une « miraculée » – dixit une experte médicale – que l’on entend, abasourdis.
Son ex-mari, donc, Dominique Pélicot, 71 ans également et qu’elle s’astreint à appeler aujourd’hui « monsieur Pélicot », l’aurait, pendant près de dix ans, droguée à coups d’anxiolytique et de somnifère dans le however de la violer et de la livrer sexuellement à des dizaines d’inconnus.
À LIRE AUSSI Procès des viols de Mazan : le parcours glaçant de Dominique P.Cinquante et un hommes seront jugés lors de ce procès-fleuve, la plupart pour viols aggravés, ils encourent jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle. Dix-huit détenus sont présents dans le field des accusés. Les autres, parfois masqués, s’entassent sur les bancs de la salle Voltaire du palais de justice d’Avignon.
Ces hommes me souillent, me considèrent comme une poupée de chiffon, un sac-poubelle !Gisèle Pélicot
Coupe à la Anna Wintour, gown corail et chemiser blanc, celle qui s’est tenue à l’écart des médias pendant quatre ans – pour qu’ « on ne (la) voie pas, pour qu’on ne (l’)entende pas » – assiste aujourd’hui au grand déballage de sa vie privée. Et de tout un pan de sa vie qu’elle ignorait, et qu’elle a découvert dans le file (31 tomes). Des nuits entières dont elle n’a aucun memento, pas même des flashs, où elle dit avoir été réduite à l’état de selected, d’objet sexuel. « J’ai été sacrifiée sur l’autel du vice ! Je suis comme une morte sur son lit, le corps est chaud mais inerte. Ces hommes me souillent, me considèrent comme une poupée de chiffon, un sac poubelle ! »
C’est après avoir visionné les vidéos – « toutes plus atroces les unes que les autres » –, en mai dernier, qu’elle a décidé de lever le huis clos, qu’elle souhaitait au départ, pour ce procès. « Je ne l’ai pas fait pour moi, mais pour les autres femmes, pour que plus aucune femme n’ait à subir la soumission chimique », avance-t-elle. Sur le banc des events civiles, sa fille, Caroline Darian, qui a fait de la médiatisation de ce phénomène son fight, approuve. À ses côtés, ses deux frères, qui soutiennent également leur mère.
À LIRE AUSSI Affaire des « viols de Mazan » : qu’est-ce que la soumission chimique ? Leurs mother and father, Dominique et Gisèle, formaient le « couple idéal », disait-on. Originaires de la région parisienne, ils coulaient une retraite paisible – du moins, en apparence – dans le Sud, à Mazan, près de Carpentras (Vaucluse). Gisèle raconte à la barre remark elle est tombée amoureuse, à 18 ans, de ce « jeune homme séduisant en pull marin ». Un coup de foudre qui durera un demi-siècle.
« Je n’ai jamais eu d’autres hommes que monsieur Pélicot, c’est mon premier amour. » Elle arrête l’école dès 16 ans et se met à travailler comme secrétaire « pour être indépendante ». Celle qui a perdu sa mère très jeune fuit une belle-mère qui ne la porte visiblement pas dans son cœur ; celui qui aurait été victime d’un viol à 9 ans fuit un père tyrannique qui entretiendra une relation incestueuse avec sa fille adoptive. Ils se marient à 20 ans, sans le sou, mais avec l’envie de « construire une vie nouvelle ».
« Un stylish sort »
« On a trois enfants, on est heureux », résume celle qui décrit son mari comme « un stylish sort, un homme attentionné ». Lui est électricien, puis, après un passage dans l’immobilier, il monte sa société avec l’aide financière de ses enfants. Elle travaille comme cadre dans une grande entreprise. Gisèle sera toujours là pour assurer matériellement le practice de vie de la famille, surtout lors des déboires financiers de son mari.
Dominique est décrit comme jovial, sociable, voire extraverti ; avec l’âge, il deviendra colérique et autoritaire. Gisèle est plus effacée, mais « bonne vivante », dit-elle, tout en étant « pudique ». Elle guarantee avoir toujours aimé « monsieur Pélicot », sans avoir un jour eu l’impression d’être sous son emprise. Pourtant, l’knowledgeable psychologue la décrit comme une « personnalité influençable et impressionnable ».
Bien sûr, en cinquante ans de vie commune, tout n’a pas été rose : Gisèle reconnaît « une aventure » avec un collègue au bout de quatorze ans de mariage – un forfait qu’elle a d’ailleurs avoué à son mari – et des problèmes financiers récurrents. « Je faisais toute confiance à monsieur Pélicot », insiste-t-elle. Le couple était « fusionnel » au level de partager la même adresse mail et le même médecin.
Sur le plan sexuel, monsieur semblait avoir des besoins plus intenses que madame. Elle comprend qu’il ait pu être « frustré » face à ses refus de certaines pratiques. Il lui avait déjà fait half de son envie d’aller dans un membership échangiste (elle a accepté une fois, avec un couple d’amis, sans passer à l’acte). Elle pense avoir une sexualité « normale ». « Je ne pouvais supporter que les mains de monsieur Pélicot sur mon corps », répète-t-elle.
Il aimait la photographier quand elle sortait de la salle de bains en lingerie ou qu’elle était dénudée au bord de la piscine. Ça l’agaçait, elle lui disait d’arrêter. Puis il recommençait – c’était une sorte de « jeu » – avec cet argument imparable : « Tu devrais être contente, il n’y a pas beaucoup d’hommes qui aiment autant leur femme au bout de cinquante ans de mariage ! » Il l’appelait parfois, dans l’intimité, « ma petite salope », mais ça ne la « choquait pas plus que ça ».
La hantise de M. Pélicot, ça a toujours été de me perdre.Gisèle Pélicot
Sinon, il n’a jamais eu de geste déplacé envers la gent féminine. Jamais elle n’a soupçonné son voyeurisme : il s’est fait prendre en filmant à deux reprises sous les jupes de femmes, c’est ce dernier délit qui a stoppé les viols à répétition sur sa femme. « Si j’avais su pour sa première arrestation, je l’aurais peut-être quitté », avait-elle dit aux enquêteurs. « Ou pas », ajoute-t-elle à la barre.
« On avait tout pour être heureux »
Quand son mari lui annonce sa grosse « bêtise », ce soir de septembre 2020, dans la delicacies, il s’effondre et se met à pleurer : « Je ne veux surtout pas te perdre. » « La hantise de monsieur Pélicot, ça a toujours été de me perdre », explique-t-elle. « Pour cette fois, je te pardonne, lui répond-elle. Mais il n’y aura pas de seconde fois. » La femme dévouée aimerait l’aider, envisage un suivi psychologique. Gisèle Pélicot s’est mariée, rappelle-t-elle, « pour le meilleur et pour le pire », jamais elle n’a « lâché » son époux.
À LIRE AUSSI Sandrine Josso : « Nous voulons donner la parole aux victimes de soumission chimique » S’est-il déjà montré violent ? Il ne l’aurait été qu’une fois, jure-t-elle, lorsqu’elle lui avouera sa liaison. Il a balancé des chaises et l’a « prise par le col ». « Il s’est imaginé que j’allais le quitter, l’excuse-t-elle. Je pense qu’il était sous l’emprise de l’alcool et de la colère. » L’homme de 1,80 m et de 100 kg avait de quoi la « terroriser » quand il « parlait fort ».
À écouter Gisèle Pélicot, leur vie aurait pu se poursuivre ainsi pendant de nombreuses années. La garrigue, la piscine, les vacances en famille… « On avait une vie tellement chouette, on avait tout pour être heureux », dit-elle encore aujourd’hui. Pourtant, il y avait bien tous ces petits signes qui l’inquiétaient et qui devenaient handicapants : ces « trous noirs » (unattainable de se memento si elle s’était brossé les dents la veille ou si elle avait sorti la poubelle), des journées à dormir suivies de nuits d’insomnie, des « soucis gynécologiques », des troubles visuels, une perte de poids (de 16 kg), ses cheveux qui tombaient, et même une sortie de route en voiture…
Un début d’Alzheimer ?
Bizarrement, quand elle se rendait en région parisienne pour garder ses petits-enfants, tous ses symptômes disparaissaient. Ils réapparaissaient à Mazan, environ toutes les trois semaines. Son mari la rassurait : ça devait être le stress ou la fatigue occasionnée par les enfants. Puis la routine reprenait son cours, Gisèle se baladait avec son chien Lancôme – un bouledogue français –, elle voyait ses amies, allait chez sa coiffeuse. Mais elle était de plus en plus angoissée. « J’étais sûre d’avoir un début d’Alzheimer, je pensais que j’étais condamnée », déclare-t-elle. Ses amis et ses enfants commençaient à s’inquiéter.
Pas du style à se plaindre, Gisèle donnait le change. À l’picture de sa grand-mère – « une femme digne et droite » –, elle « cache (ses) larmes (et) partage (ses) rires ».
Elle consulte tout de même des gynécologues, un gastro-entérologue, des neurologues… « Dix ans d’errance thérapeutique », déplore-t-elle. Elle se demande même si elle ne sombre pas dans la folie : « J’avais peur de prendre le practice seule, de louper l’arrêt, je me pinçais… »
Ce sont des administrations chroniques, c’est vraiment tout le temps.l’knowledgeable toxicologique
On lui fait un scanner : rien à signaler. Peut-être a-t-elle subi un « ictus cérébral », émet un spécialiste. Un autre la trouve bien anxieuse : il prescrit à cette insomniaque de la « mélatonine magistrale » pour passer de bonnes nuits.
Évidemment, il ne sait pas que son mari, présent à chaque session, lui administre à son insu des comprimés de Temesta (une benzodiazépine) et de Stlinox (un somnifère) à haute dose (« autour de 10 mg », d’après l’knowledgeable toxicologue) qui abrutissent cette sexagénaire pourtant dynamique. Des médicaments qu’il se faisait prescrire par son généraliste (ainsi que du Viagra) mais aussi par son frère médecin, et qu’il cachait dans une chaussette de tennis. Un mélange de ces deux « molécules hypnotiques » et « amnésiantes » est retrouvé dans les cheveux de la victime : « Ce sont des administrations chroniques, c’est vraiment tout le temps », insiste le toxicologue, à la barre, pour qui l’amnésie décrite peut être « totale ». Selon lui, il est « extrêmement facile » d’écraser ces cachets et de les dissoudre dans un liquide (jus de fruit, café…) ou dans une pâtisserie. « Ça passe totalement inaperçu. »
Monsieur Pélicot aimait bien cuisiner. Il n’était pas uncommon qu’il prépare à sa femme, le soir, des purées, avec beaucoup d’ail et d’herbes, histoire de masquer le goût d’un médicament. Une fois, elle se souvient d’avoir trouvé suspecte la couleur (verte) de sa bière blanche, que son mari s’est empressé de jeter dans l’évier. Mais de là à imaginer une soumission chimique, phénomène dont elle ignorait tout…
Certains, du côté de la défense, s’étonnent aujourd’hui de l’absence de soupçons de madame Pélicot. Comment aurait-elle pu se douter qu’elle était droguée, elle qui ne prenait presque jamais de médicaments ? Sur son corps, elle n’a jamais remarqué de hint cutanée ; au réveil, elle ne ressentait pas de douleurs ; le matin, elle était dans la même tenue que la veille – pyjama ou nuisette, et jamais dans la lingerie fantastic avec laquelle il la déguisait. Une seule fois, elle s’est retrouvée sans comprendre, dans son lit, avec une culotte dans la primary.
« Un risque very important »
Or, pendant de nombreuses nuits (200 viols au whole), il se passe dans sa propre maison, dans sa chambre, dans son lit, des « scènes de barbarie », dit-elle, après avoir visionné les vidéos filmées par son mari qu’elle a longtemps refusées de voir. « Ce ne sont pas des scènes de sexe [comme le président Roger Arata a choisi de les nommer, la veille, afin de respecter la présomption d’innocence, NDLR], ce sont des scènes de viol ! s’emporte-t-elle. Ils sont un, deux, trois sur moi… Je suis inanimée. » Et de poursuivre, à suite d’une query sur son éventuel consentement : « Jamais je n’aurais accepté quoi que ce soit de la half de ces individus. C’est intolerable de pouvoir penser ça… J’ai beaucoup de likelihood d’être debout aujourd’hui, j’aurais pu y rester. »
À six reprises, elle a été violée par un homme séropositif. « Par une likelihood extraordinaire, elle a échappé au VIH, elle a échappé à une hépatite B ou C, à la syphilis… » énumère l’experte médicale, Anne Martinat Sainte-Beuve. En revanche, la victime a contracté quatre MST (dont un papillomavirus). La médecin n’hésite pas à dire qu’elle a couru « un risque very important », son « état observé était proche du coma », sans compter les mises en hazard quotidiennes (en voiture, à vélo, dans sa piscine…).
« Il y a chez madame Pélicot une résilience tout à fait exceptionnelle, remarque cette experte aguerrie, qui n’a jamais eu à traiter pareil file. Elle a fait de ce qui aurait pu la détruire une power. »
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