Réquisitions de personnels, interventions des forces de l’ordre, grève reconduite : le point sur la mobilisation dans les raffineries

Le secteur de l’énergie reste particulièrement mobilisé contre la réforme des retraites. Environ 15 % des stations-service étaient en rupture d’au moins un carburant, vendredi 24 mars au matin, selon des données publiques analysées par l’Agence France-Presse (AFP). Dans les neuf départements les plus touchés – Loire-Atlantique, Morbihan, Mayenne, Maine-et-Loire, Ille-et-Vilaine, Ariège, Bouches-du-Rhônes, Hérault et Var –, entre deux et cinq stations-service sur dix sont à sec, selon ces données.

Réquisitions de personnels, interventions des forces de l’ordre, grève reconduite : le point sur la mobilisation dans les raffineries contre la réforme des retraites, une semaine après son adoption.

A la raffinerie TotalEnergies de Gonfreville-l’Orcher, le pompage a redémarré

L’approvisionnement du bassin parisien en carburants, et notamment en kérosène, par la grande raffinerie TotalEnergies de Gonfreville-l’Orcher en Normandie a repris vendredi après une intervention des forces de l’ordre et la réquisition de quatre salariés.

« Le pompage a redémarré » et « cela permet d’approvisionner l’Ile-de-France », a déclaré la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. L’oléoduc Le Havre-Paris alimenté depuis la raffinerie dessert aussi les aéroports parisiens. Les forces de l’ordre sont aussi intervenues pour débloquer deux dépôts pétroliers : à Port-la-Nouvelle (Aude), qui était bloqué depuis le 16 mars, et à Frontignan (Hérault).

Plusieurs personnalités, dont l’actrice Adèle Haenel, l’économiste proche de La France insoumise Frédéric Lordon ou encore le rappeur havrais Médine, sont venues soutenir vendredi après-midi les grévistes de la raffinerie TotalEnergies de Normandie. « Ce qu’on veut, c’est imposer un rapport de force et c’est ce qui est en train de se jouer ici avec les raffineurs », a déclaré Adèle Haenel, venue de Paris avec cent cinquante étudiants répartis dans deux cars affrétés par le Réseau pour la grève générale.

Devant la raffinerie, les quelque 500 personnes rassemblées vers 13 heures, selon la police, ont également été rejointes par Médine. « On défend nos grévistes, nos réquisitionnés, parce que voir des pères de famille réquisitionnés de force pour les emmener bosser alors qu’ils sont grévistes, ça fait partie de la déraison pour laquelle je me trouve ici », a déclaré à l’Agence France-Presse l’artiste de 40 ans.

Le refus de relève, qui bloque toujours la production et la majorité des expéditions de la raffinerie, a été reconduit pour soixante-douze heures lors de l’assemblée générale de 14 heures. Mais pour des raisons de sécurité salariés et syndicats se sont accordés pour autoriser des relèves, un des salariés étant présent sur le site depuis cinquante heures, selon la CGT.

Selon le secrétaire général CGT Alexis Antonioli, quatre nouveaux salariés ont été réquisitionnés pour le quart de l’après-midi après les premières réquisitions sur ce site tôt vendredi pour expédier du kérosène à destination des aéroports parisiens.

A la raffinerie TotalEnergies de Donges, six salariés réquisitionnés, la grève reconduite

A la raffinerie TotalEnergies de Donges (Loire-Atlantique), où la grève a été reconduite jusqu’au 31 mars, six salariés ont été réquisitionnés selon l’intersyndicale. L’objectif est d’approvisionner le dépôt de Vern-sur-Seiche, près de Rennes.

Les gendarmes sont venus frapper à la porte de trois salariés vers 11 heures vendredi « pour aller les réquisitionner, pour aller tourner des vannes », a expliqué Fabien Privé Saint-Lanne, délégué CGT du site. Au même moment, trois autres salariés déjà présents dans la raffinerie ont été réquisitionnés jusqu’à la fin du quart du matin, selon lui. Le ministère de la transition énergétique a confirmé l’information.

En début d’après-midi, une centaine de personnes ont escorté les trois salariés réquisitionnés pour le quart de l’après-midi jusque dans l’enceinte de la raffinerie, en chantant « On est là », a constaté une journaliste de l’AFP. « Nos camarades étaient sous stress, sous pression », a déploré Fabien Privé Saint-Lanne. « A ma connaissance, aujourd’hui [vendredi] de toute façon le chargement du dépôt de Vern-sur-Seiche n’est pas d’actualité, puisqu’il y aurait un problème technique », a-t-il souligné.

Selon les représentants syndicaux présents devant la raffinerie, de nouveaux salariés pourraient être réquisitionnés pour chaque prochain quart.

A la raffinerie Esso-ExxonMobil de Port-Jérôme-Gravenchon, la production est mise à l’arrêt samedi

La raffinerie Esso-ExxonMobil de Port-Jérôme-Gravenchon (Seine-Maritime), dont les expéditions de carburants sont bloquées, va être contrainte de stopper sa production à compter de samedi, faute de pétrole brut à raffiner.

« Comme le mouvement a été reconduit à la CIM [Compagnie industrielle maritime], sur le dépôt pétrolier du Havre, il n’y aura pas d’alimentation en brut sur la raffinerie de Gravenchon, ce qui va entraîner l’arrêt des installations demain », a déclaré Christophe Aubert, délégué CGT Esso-ExxonMobil, confirmant une information de BFM-Normandie. « Ça va s’arrêter et pour pouvoir redémarrer, il faut compter dix jours à compter de la réception de brut », a ajouté M. Aubert.

Afin d’éviter ces manœuvres d’arrêt et de redémarrage longues et délicates et leurs conséquences futures sur l’approvisionnement en carburants de l’Ile-de-France et du Grand Ouest, il faudrait que le gouvernement réquisitionne des personnels grévistes au dépôt pétrolier du Havre, une option peu probable, à en croire M. Aubert.

« Le but des réquisitions, d’après ce que j’ai compris de la part du gouvernement, c’est plutôt d’envoyer des produits finis. Donc, il y a très peu de chance qu’il y ait des expéditions de pétrole brut sur la raffinerie de Gravenchon », située à une vingtaine de kilomètres du Havre, a-t-il déclaré.

Concernant l’autre raffinerie française du groupe Esso-ExxonMobil, à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), elle « continue de fonctionner », a précisé la direction, selon laquelle la production est réduite au minimum, et les expéditions, bloquées.

Le Monde avec AFP

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