Depuis plusieurs mois, la plus forte vague d’inflation de ces dernières décennies frappe la France et l’Europe. Elle concerne particulièrement les produits alimentaires : en un an, leur prix a bondi d’environ 15 %, avec des hausses encore plus vertigineuses sur certains produits, comme la viande ou certains fruits et légumes. Les personnes en situation de précarité en sont les premières victimes. L’arbitrage entre se nourrir, se loger, se déplacer ou encore se chauffer n’est plus possible et amène des centaines de milliers de personnes à se tourner pour la première fois vers les associations de solidarité.
Cet hiver, les Restos du cœur, qui distribuent chaque année environ 35 % des volumes de produits destinés à l’aide alimentaire en France, ont accueilli 22 % de personnes supplémentaires par rapport à l’hiver 2021-2022. Tous les territoires et tous les profils de personnes accueillies connaissent des augmentations significatives. C’est la hausse la plus massive et la plus rapide à laquelle notre association doit faire face depuis sa création, il y a près de quarante ans ! Et la tendance s’est encore accélérée au cours du mois de mars. Derrière ces chiffres, ce sont des visages, ceux d’enfants, nombreux, de familles monoparentales, de travailleurs précaires qui ne peuvent plus s’en sortir. Nos équipes se mobilisent pour leur venir en aide et tiennent bon, notamment en recrutant de nouveaux bénévoles et en ouvrant davantage de créneaux de distribution.
Effet ciseaux dévastateur
En parallèle, cette inflation pèse fortement sur le budget des associations de solidarité elles-mêmes : l’augmentation des coûts de l’énergie ou de ceux des produits alimentaires achetés vient directement percuter leur équilibre financier. Cet hiver, les Restos du cœur sont passés d’une moyenne de 2,5 millions d’euros de commandes alimentaires par semaine à près de 5 millions d’euros pour répondre à la hausse de la fréquentation et des prix, et compenser la diminution des dons sur certains produits.
Nous sommes donc face à un effet ciseaux dévastateur qui met en danger la viabilité des associations, au risque de devoir réduire significativement l’aide et l’accompagnement qu’elles apportent. Même si l’inflation ralentit dans les prochains mois, ce que nous souhaitons tous, elle ne se traduira pas immédiatement par une amélioration des conditions de vie des plus précaires et une diminution du recours à l’aide alimentaire.
La situation que connaissent aujourd’hui les Restos est celle que rencontrent plus ou moins fortement des milliers d’associations de solidarité partout en Europe.
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