Voyage dans l’empire des sens | EUROtoday

Get real time updates directly on you device, subscribe now.


Écouter, observer, toucher, goûter, sentir le monde qui nous entoure… Les sens composent les expériences de nos existences. « Rien dans notre intelligence qui ne soit passé par nos sens », comme le résume Aristote dans son ouvrage Métaphysique. Car c’est par eux que tout start. Dès les premiers mois de nos vies, ils sont la porte d’entrée de tout savoir, le fondement sur lequel se construit notre compréhension du monde.

La publication sciences et tech

Tous les samedis à 16h

Recevez toute l’actualité de la sciences et des techs et plongez dans les Grands entretiens, découvertes majeures, improvements et coulisses…

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l’adresse e-mail :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les circumstances générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Merveilles de la nature, ce sont ces fameux sens qui ont été au cœur de cette 9e édition de Neuroplanète, qui s’est tenue les 15 et 16 mars, en partenariat avec la Ville de Nice. Pendant deux jours, alors qu’a lieu au même second la Semaine du cerveau, chercheurs, neurologues, philosophes, artistes et psychiatres se sont réunis pour partager leurs recherches, leur ardour et mesurer le chemin exceptionnel qui a été parcouru ces dernières années dans l’exploration de notre cerveau. Des pouvoirs de la voix aux conséquences de la surdité, en passant par les nouvelles applied sciences pour recouvrer la vue ou remarcher, cette année encore, le programme fut riche et les salles combles d’auditeurs. Car, comme le disait aussi Jules Renard, « un cerveau bien soigné ne se fatigue jamais ».

« L’empire des sens pour moi, c’est de faire du bien à ma ville. On peut tous agir sur le cerveau, chacun à sa manière. La mienne, c’est de faire de Nice le reflet, le défi, l’espérance du futur pour ceux qui vivent ici. »Christian Estrosi, maire de Nice, président de la métropole Nice Côte d’Azur, président délégué de la région Sud Paca

« L’objet du sacré est désormais le progrès method. Il ne s’agit pas de le condamner mais de le mettre à distance, de cultiver le doute. »Camille Riquier, philosophe, doyen de la faculté de philosophie de l’Institut catholique de Paris, auteur de Nous ne savons plus croire (PUF, 2020)

La face cachée de nos vies

Intelligence, mémoire, vieillissement… En seulement une heure, Lionel Naccache, neurologue, professeur à Sorbonne Université, chercheur à l’Institut du cerveau, normalien et auteur de nombreux essais (Apologie de la discrétion, Odile Jacob), a passé en revue tout ce que l’on sait – ou non – sur le cerveau. À commencer par le sommeil. « C’est un tiers de notre vie, une face cachée de l’existence dont on a peu de souvenirs », s’émerveille le scientifique. C’est pourtant ce même sommeil qui pourrait permettre à chacun d’entre nous de devenir un génie. « Thomas Edison s’est rendu compte qu’il y avait une situation propice à sa créativité intellectuelle. Celle de penser éveillé au problème à résoudre, puis de se laisser aller dans un sommeil léger, muni d’une sphère métallique prête à tomber et à le réveiller pour ne pas le laisser trop sombrer. À coup presque sûr, dès son réveil, il avait la answer à son problème. » Cette « méthode Edison » a été vérifiée au cours d’une étude réalisée en 2023 par deux chercheuses, Delphine Oudiette et Isabelle Arnulf. « La proportion de sujets qui trouvaient la answer au problème donné grimpait à 80 % chez ceux réveillés dès la fin de la section 1 de leur sommeil. » Quant à la query de savoir si l’on exploite assez « cette merveille de technologie », Lionel Naccache est catégorique. « On utilise 100 % de notre cerveau en permanence. Mais ce même cerveau ne cesse de se sculpter par l’expérience, l’éducation, les interactions sociales. » Pour prendre soin de cette neuroplasticité, « il ne faut pas médicaliser la vie saine. L’important, c’est de stimuler son cerveau et ses compétences de manière apaisée, en se laissant guider par ce que l’on aime », préconise le scientifique.

« L’intelligence, c’est la capacité d’adaptation et, en cela, les oiseaux ont sur nous d’immenses avantages. »Olivier Poivre d’Arvor, écrivain, ambassadeur et envoyé spécial du chef de l’État pour les océans et les pôles, président du musée nationwide de la Marine

Redonner le pouvoir d’écrire

Tous les mathématiciens vous le diront, leur self-discipline permet de décrire le monde, de le comprendre. Y compris le cerveau. En combinant mathématiques et informatique, des chercheurs ont réussi à modéliser le cerveau et à interpréter son activité électrique. Grâce à cela, il est désormais potential d’identifier les foyers où se déclenchent les crises d’épilepsie, de prédire l’état neurologique de sufferers dans le coma et d’aider des personnes atteintes de maladies neurodégénératives, comme la maladie de Charcot, à communiquer et à écrire par la easy pensée. C’est sur ce dernier cas que Maureen Clerc, directrice du centre Inria à Sophia Antipolis Méditerranée, a travaillé. La chercheuse et son équipe ont développé un logiciel, le P300 Speller, qui, associé à un casque d’électroencéphalographie, permet aux sufferers d’épeler des lettres, d’écrire et de communiquer. « La personne regarde un écran où des lettres clignotent aléatoirement. Lorsque la lettre désirée clignote, cela crée une réponse cérébrale suffisamment forte pour que les capteurs la détectent et déduisent le mot. » Une technologie qui apporte de l’espoir chez les sufferers. À tel level que l’un d’entre eux a installé l’outil chez lui. « Même avec peu de moyens, il réussit à utiliser le logiciel au quotidien », se réjouit Maureen Clerc.

« L’odorat est le premier sens sur lequel je m’appuie quand je delicacies. Seulement après viennent la vue, la texture, le bruit, le goût… »Florencia Montes, co-cheffe du restaurant Onice qui a décroché sa première étoile Michelin le 18 mars 2024

De l’data contre la désinfo

Les faux information, Léa Surugue les connaît bien et les fight au quotidien. Cette journaliste à l’Inserm coordonne notamment Canal Détox, une minisérie vidéo dont l’objectif est de démystifier les idées reçues en matière de santé, avec l’aide de scientifiques travaillant réellement sur les thématiques en query. L’enjeu est de taille, tant les conséquences peuvent parfois être dramatiques. L’un des sujets les plus vus de la chaîne de l’Inserm concerne le jeûne pour « guérir » le most cancers. « Dans le domaine de la santé, le problème, ce sont les témoignages des gens qui disent : “Sur moi, ça a marché.” Il existe des études scientifiques sur le jeûne, mais rien de bien mené. Quoi qu’il en soit, dans la majorité des cas, le jeûne ne sert à rien et peut même être dangereux, la dénutrition pouvant affaiblir l’organisme », conclut-elle. Des propos que ne saurait contredire Mathieu Molimard, chef du service de pharmacologie médicale au CHU de Bordeaux, l’un des premiers, dès 2020, à alerter sur les risks de l’hydroxychloroquine. « Les fausses informations naissent en quelques secondes, mais on a besoin de plusieurs mois, voire d’années, pour les rectifier. » Du Covid et de sa propre expérience, Mathieu Molimard retient quatre étapes nécessaires pour lutter efficacement contre la désinformation : apprendre à la détecter, éduquer dès l’école, former les médecins et sanctionner les désinformateurs. « La désinformation est un poison pour la démocratie. Impunie, elle prolifère et instille le doute et la suspicion à l’égard de la recherche, de la science et de l’enseignement. »

«

Trouver sa voix

Du coup de gueule au murmure, « la voix dit de vous votre personnalité, y compris dans la drive de son silence », résume Jean Abitbol, phoniatre, chirurgien laser et cervico-facial, oto-rhino-laryngologiste et auteur des Voix de notre vie (Grasset, 2023). « Le timbre, le rythme, la musicalité sont autant de portes ouvertes ou fermées aux autres. » À tel level que certains sufferers de Stéphanie Perrière, orthophoniste spécialisée en rééducation vocale à Nice et coautrice d’Enseignants, prenez soin de votre voix ! (De Boeck, 2021), viennent la voir simplement pour « avoir davantage de cohérence par rapport à leur identité vocale, comme certains sufferers transgenres. D’autres, atteints de la maladie de Parkinson ou paralysés des cordes vocales à la suite d’un most cancers de la thyroïde par exemple, perdent cette musicalité et se retrouvent dénarcissisés, dans une difficulté totale à moduler leur voix, à faire passer un message ». Outil premier de communication, la voix aurait tendance à devenir plus grave avec l’âge, à perdre en jeunesse, tandis qu’on l’utilise moins. Jean Abitbol de réagir : « Nous sommes tous des athlètes de la voix ! Il faut la stimuler tout au lengthy de la vie, sinon elle s’atrophie, comme un biceps. » Lire à voix haute ou prendre des cours de chant sont autant de façon de préserver « cette œuvre d’artwork ».« Les voix ont changé à travers les époques, les modes de vie, les nécessités socioculturelles. Chacun d’entre nous a une voix distinctive, irreproductible », conclut le phoniatre.

« Le théâtre, c’est une célébration de l’humain, c’est l’intelligence du ventre, de l’émotion. Jouer, ce n’est pas agir, c’est réagir. »Muriel Mayette-Holtz, comédienne, metteuse en scène et directrice du Théâtre nationwide de Nice

« Apprendre un texte, c’est apprendre un chemin. Je l’ai fait dix fois, vingt fois en répétition. À terme, je n’ai même plus à y penser, sans tout à fait l’avoir appris par cœur. »Félicien Juttner, acteur (ancien pensionnaire de la Comédie-Française), auteur et metteur en scène

À deux pas de marcher

Le fonds Clinatec est à deux pas de réaliser le rêve du Pr Benabid, son fondateur : celui de faire (re)marcher des sufferers para- ou tétraplégiques. Depuis dix ans, le pari de ce centre de recherche biomédicale hors du commun est de trouver des options thérapeutiques à des handicaps et maladies neurodégénératives non pas en élaborant des molécules chimiques, mais en se tournant vers les nouvelles applied sciences et la physique. Dernier exemple en date : les chercheurs ont développé, après plusieurs itérations, un implant cérébral qui recueille en temps réel les ondes cérébrales actives lors de la pensée d’un geste. Décodés au moyen de l’IA dans l’équivalent d’un ordinateur moveable, ces signaux sont ensuite envoyés, sans fil, vers un implant spinal situé sous la moelle épinière. En mai 2023, un affected person paraplégique a ainsi pu remarcher avec cette technologie qui prend peu de place. Une première mondiale dont Laurent Hérault, directeur du fonds Clinatec, est fier. « On a réussi à recréer, là où il y avait une coupure entre la pensée et le geste, un pont numérique sans fil pour faire remarcher un affected person naturellement, sans qu’il y pense vraiment. » Le fonds travaille également sur d’autres options thérapeutiques pour d’autres pathologies, comme le diabète ou la maladie d’Alzheimer. L’espoir de Laurent Hérault ? « Qu’au XXIe siècle on utilise la physique et les nouvelles applied sciences pour détecter, prévenir et traiter les pathologies, sans avoir nécessairement recours aux médicaments, surtout quand ceux-ci n’existent pas. »

« Multiplier les axes de recherche est essentiel. Un traitement universel, seul, ne pourra pas soigner le glioblastome [la tumeur cérébrale la plus courante et la plus meurtrière]. »Maximilien Vermandel, chercheur au CHRU de Lille, ancien directeur de recherche à l’Inserm et CEO de la start-up française Hemerion

Entendre pour exister

Isolement social et sensoriel, dépression… Les effets de la presbyacousie, la déficience auditive liée à l’âge, peuvent accélérer les troubles cognitifs et les risques de développer une maladie neurodégénérative, comme la maladie d’Alzheimer. « La surdité est un cercle vicieux », explique Hélène Amieva, directrice de l’équipe de recherche à l’Institut de santé publique d’épidémiologie et de développement, centre Inserm U1219 Bordeaux, qui mène depuis trente ans une étude sur les trajectoires de vieillissement. « Moins on entend, plus on s’isole. Or le sentiment d’utilité sociale, que cela vienne d’une activité associative, professionnelle ou familiale, peut être un facteur très puissant sur votre trajectoire de vieillissement », proceed Olivier Guérin, professeur de gériatrie, chef du pôle réhabilitation autonomie vieillissement du CHU de Nice. « Pour bien vieillir, corriger tout ce qui peut vous isoler est essentiel. » À cela s’ajoutent d’autres facteurs, comme l’effort d’écoute. « En se concentrant davantage sur ce qui est en prepare d’être dit, le cerveau dépense trop d’énergie pour le décodage pur et easy, au détriment des autres zones cérébrales qui servent à la mémorisation auditive, à l’analyse ou à la repartie », ajoute Nicolas Guevara, professeur d’ORL et chirurgie cervico-faciale à l’Institut universitaire de la face et du cou du CHU de Nice. La bonne nouvelle, c’est que la presbyacousie est un facteur dit « réversible », rassure Hélène Amieva. « On a surtout observé ce déclin cognitif chez les personnes sans correction auditive ». Appareils auditifs ou implants cochléaires, peu importe. Pour la chercheuse, il faut avant tout changer l’picture que l’on en a. « Il y a plus de stigmatisation autour de l’appareil auditif que sur la surdité en elle-même. C’est un enjeu de santé publique. Les campagnes de prévention doivent aller au-delà du easy “appareillez-vous”. »

À LIRE AUSSI Quand la musique est bonne… pour le cerveau

« Avec l’IA, je développe un outil pour rendre accessible la recherche bibliographique aux déficients visuels. »Maxime Lokietek, kinésithérapeute aveugle, champion worldwide d’escrime et de surf, président fondateur de la Bibliosphère (Lyon)

https://www.lepoint.fr/sciences-nature/voyage-dans-l-empire-des-sens-21-03-2024-2555664_1924.php